Les ceintures de compétences [Rappel]

Un peu d’histoire

Parce qu’il pratiquait le judo, l’idée d’évaluer par ceintures est venue à l’instituteur Fernand Oury dans les années 1970. Il avait observé la capacité des judokas à coopérer malgré les écarts de niveaux dans le groupe. A l’origine de la « pédagogie institutionnelle », Fernand Oury a transféré ce qui fonctionnait dans cette pratique sportive aux préoccupations pédagogiques.

Pourquoi les ceintures

RENDRE L’ÉLEVE ACTEUR DE SON APPRENTISSAGE

Le but de l’enseignant qui propose une ceinture pour évaluer une compétence n’est pas d’évaluer, mais plutôt d’offrir un outil à l ’élève afin qu’il mesure lui-même ses progrès et ce qu’il reste à faire pour maîtriser davantage la compétence travaillée.

Une ceinture c’est

« Un outil:

  • de mesure de la progression des élèves dans l’acquisition d’une compétence,
  • de communication avec les élèves pour les faire entrer dans une démarche d’acquisition d’une compétence,
  • d’appropriation des critères de réussite, de façon progressive et graduée,
  • de réflexion d’enseignants sur les critères et la progressivité de l’acquisition d’une compétence »1.
  • de suivi de la progression de chaque élève.

Une ceinture ce n’est pas

  • Un outil sommatif qui ne serait utilisé qu’une fois par l’enseignant.
  • Une méthode infaillible pour acquérir tous les éléments constitutifs de l’exercice d’une compétence. L’enseignant doit donner, par sa pratique quotidienne, les moyens à l’élève d’accéder à la ceinture supérieure.
  • Un « tableau » exhaustif de l’ensemble des savoirs à acquérir.

Comment construire les ceintures

La ceinture blanche, première ceinture, doit être obtenue facilement pour rassurer les plus faibles. Elle doit marquer un premier engagement dans le travail.

Exemple : Ceinture / S’exprimer à l’oral :

J’ai traité le sujet

Je suis capable de prendre la parole devant le groupe.

La ceinture rouge, dernière ceinture, doit proposer aux meilleurs élèves un horizon d’approfondissement qui pourrait aller au-delà des attentes des programmes.

Exemple : Ceinture / Rédiger un texte :

Je sais construire un texte en inscrivant mon récit dans la longue durée en faisant référence à des échelles de temps différentes.

Entre les deux ceintures, il faut ajouter progressivement des éléments de difficulté.

Chaque professeur peut se lancer dans la construction de ceintures mais il est plus intéressant que cet outil serve à une réflexion d’équipe :

  • Disciplinaire : les professeurs d’histoire-géographie d’un établissement peuvent discuter et mettre en place des ceintures similaires pour donner du sens aux élèves qui changent d’enseignants au cours du même cycle.
  • Pluridisciplinaire : des ceintures transdisciplinaires peuvent être construites par des enseignants d’une même équipe pédagogique (sur l’oral ou l’argumentation par exemple).

Le principe

  • Valider des ceintures (comme au judo)
  • Chaque ceinture regroupe plusieurs compétences
  • Tout le monde démarre à la même ceinture
  • Il n’y a pas de retour en arrière
  • Pour passer une ceinture, il faut absolument avoir la précédente

Chaque semaine, les élèves reçoivent un plan de travail hebdomadaire dans lequel ils devront indiquer les compétences qu’ils souhaitent valider sur une semaine.

En fonction du degré d’autonomie, les élèves sont libres du choix des compétences et de l’impression des fiches associées. Au départ, c’est le maître qui les guide dans ce choix.

Dans l’emploi du temps, il y a des plages de « travail personnel ». Ce sont durant ces plages que l’élève complète son plan de travail. Il peut également l’avancer lorsqu’il a terminé les autres tâches qui lui sont demandées.

Les fiches sont corrigées par l’enseignant. Le résultat (vert, orange ou rouge) doit être reporté immédiatement dans le plan de travail hebdomadaire puis dans le référentiel des ceintures. L’élève bénéficie de 3 essais pour valider la compétence qu’il souhaite évaluer.

Si la compétence est validée lors du premier essai, il n’est pas nécessaire de faire les suivants.

Les grands principes

1. Permettre aux élèves d’avancer à leur rythme

Cette démarche a pour but d’aider les enfants à avancer dans les apprentissages à partir d’où ils en sont.

Un élève en difficulté aura plus de temps pour acquérir une notion avant de passer à une autre. Ce qui n’est pas possible si on évalue tous les élèves sur la même compétence à un instant T.

De la même manière, un élève qui a des facilités, pourra aller plus loin sans attendre le reste de la classe.

Chaque élève aura un parcours individualisé et personnalisé en fonction de ses forces et faiblesses. Chaque élève avance à son rythme.

2. Une dynamique de réussite

On est tous doués pour quelque chose. Certains sont plus à l’aise en maths, d’autres en français. Le système de ceintures permet aux élèves de situer leurs forces et leurs faiblesses.

Un élève peut être ceinture bleue en numération et ceinture verte en orthographe. Dans ce cas, l’élève est valorisé par sa ceinture bleue puisqu’il peut être tuteur et superviser des camarades dans cette discipline, mais il sait aussi, qu’il doit renforcer ses compétences en orthographe.

Il pourra également faire appel à ses camarades de ceinture plus élevée pour l’aider.

3. La coopération, l’entraide et l’autonomie

Un système de tutorat se met en place au fil de l’avancement du dispositif. Aussi, plus l’élève devient autonome, plus il est chargé de responsabilités.

De manière générale, ce système vise à développer l’autonomie des élèves en leur permettant de devenir acteur de leurs apprentissages. Ils apprennent à travailler pour eux.

4. La visibilité

Grâce aux ceintures, l’enseignant, la famille et surtout l’élève sait exactement où il se trouve dans les apprentissages.

Ce dispositif rend beaucoup plus clairs les livrets traditionnels qui ne renseignent pas sur l’état d’acquisition des compétences par l’élève.

Les ceintures, elles, permettent de savoir plus finement ce qui bloque et d’y remédier efficacement.

5. Dédramatiser l’évaluation et en faire un outil pour se construire

L’évaluation engendre souvent du stress pour l’élève. Ce ne devrait pas être le cas, car les meilleurs apprentissages se construisent sur nos erreurs. Il faut parfois se tromper pour progresser.

Le fait d’avoir plusieurs essais permet à l’élève de rentrer dans cette logique. Il est évalué tous les jours et cela devient une habitude. Plus de stress avant les « contrôles ».

Exemple d’affichage des ceintures pour tutorat

Merci à François Lamoureux, Samira Hallaouy Nougué, Thomas Héniart et toute l’équipe C2C Edu.

13 commentaires

  1. Bonjour à tous,
    À force de lire, de chercher et de me questionner, je pense me lancer dans les ceintures l’année prochaine, en passant en élémentaire.
    Cependant, il y a une question que je me pose: environ combien d’entraînements différents faut-il proposer dans le cadre des ceintures pour 1 compétence? 3 ou 4 vous semblent-ils suffisants ? (si on exclu les entraînements qui peuvent être fait sur d’autres plages de travail comme des ateliers par exemple.) Ou est-ce variable en fonction de la quantité d’outils (exercices écrits ou jeux) dont vous disposez? Pensez-vous qu’il y ait une quantité minimum d’outils à avoir pour chaque compétence ou un maximum à ne pas dépasser pour éviter que les élèves ne se perdent?
    Merci d’avance. 🙂

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    • Bonjour,

      Merci pour votre message. Nous travaillons tous différemment. Je vous propose de parcourir les articles du blog sur les parcours mais aussi ceux de mon blog personnel sur les parcours également et de revenir ensuite vers nous.
      Perso je ne démultiplie pas les entraînements. Seulement entre les essais 1 et 2 et 2 et 3. Un exercice maîtrisé peu importe ça forme le suffit. Mais tout le monde ne pense pas comme moi.
      À bientôt

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      • Wahou! Merci pour cette réponse et le renvoi à votre blog. Car…ça y est! En lisant votre article sur les « parcours », j’ai enfin compris ce qu’ils sont. Ou plutôt, ce qu’ils ne sont pas: un parcours n’est pas un objectif en soit, mais une façon différente de permettre à l’élève d’atteindre l’ensemble des objectifs d’un item avec d’autres supports. (C’est bien ça?)
        Du coup, est-ce que ça vous semble envisageable de ne pas « imposer » un parcours, mais plutôt une liste d’outils ou exercices différents pour travailler un item donné en laissant la possibilité aux élèves de manipuler ou faire tous les exercices ou pas et donc de s’auto-évaluer et oser passer les essais quand ils se sentent prêts, qu’ils aient fait 1, 4 ou 10 entraînements?
        Pour les élèves les moins autonomes, l’enseignant pourrait cocher dans le référentiel les outils qu’il souhaite que l’élève réalise et pour les plus autonomes, cela permettrait peut-être de nourrir les intelligences multiples de chacun: est-ce que je veux manipuler la tablette? écrire dans mon cahier? faire un jeu avec un binôme?
        Peut-être qu’ainsi ça permettrait aux élèves de constater comment ils travaillent et apprennent le mieux.
        C’est peut-être utopique mais n’ayant que l’expérience de la maternelle pour le moment, je ne me rends pas vraiment compte si cette idée est réalisable ou pas. :/

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  2. Bonjour ,
    Cela fait plusieurs fois que je me penche sur les ceintures de compétences mais il y a quelque chose que je ne comprends pas : pourquoi une ceinture regroupe-t-elle plusieurs compétences ? Certains enfants peuvent bloquer sur une ceinture parce qu’une seule des compétences de la ceinture n’est pas acquise … Je me demande pourquoi les ceintures ne sont pas regroupées par compétences mais en ajoutant des critères supplémentaires selon le niveau de difficulté acquis ? Par exemple, en grammaire :il y a la compétence sur la nature et celle sur les fonctions (je simplifie) , pourquoi ne pas faire une progression de ceintures pour chacune d’elles au lieu de faire une seule progression de ceintures en grammaire ? Il y a sans doute une raison à cela et qui m’échappe … J’ai vu qu’il existait des parcours : est-ce qu’ils fonctionnent également de la même façon en regroupant plusieurs compétences ?Pourriez-vous m’éclairer s’il vous plait car le principe m’intéresse beaucoup.
    Cordialement

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    • Bonjour,
      Un parcours pour une compétence ! On ne peut pas faire des ceintures par compétences, on n’en finirait pas des référentiels ! Nous avons choisi les domaines principaux, puis nous avons essayé de les regrouper par niveau de difficulté en établissant une progression en faisant des rappels réguliers ! Je ne sais pas si je suis clair. Après votre idée est bonne mais demande un sacré boulot. Faire des ceintures pour chaque compétence..
      si vous vous lancez, je suis partant pour voir vos ceintures. Cela m’intéresse.
      À bientôt

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      • J’ai posé la question il y a quelques mois à une collègue qui travaille en « pédagogie Freinet » et qui elle, utilise les brevets et non pas les ceintures après avoir longuement hésité à ses débuts.
        Elle affiche dans sa classe la liste de tous les objectifs qui seront à acquérir sur les 3 années où elle garde ses élèves (CE2,CM1,CM2).

        Par exemple:
        -tracer un cercle au compas
        -tracer un cercle avec un rayon donné
        -tracer un cercle à partir du diamètre donné

        Et elle fait cela pour toutes les compétences des programmes qu’elle souhaite faire travailler à ses élèves dans le cadre du travail individualisé.
        Pour chacun de ces objectifs, elle dispose d’une batterie d’outils qui sont soit des jeux, soit des exercices de manuels… Et qu’elle a emmagasinés avec le temps et listés sur des feuilles seyes rangées dans un classeur (c’est un peu comme les parcours qui sont là mais avec des listes plus ou moins longues de jeux ou d’exercices différents). En revanche, ses élèves n’ont pas de parcours visuels comme ici. Ils doivent donc remplir leur plan de travail avec elle et en fonction des brevets (autrement dit: « objectifs ») qu’ils souhaitent travailler, ils regardent dans le classeur de la maîtresse les outils qu’ils peuvent utiliser.
        Quand un objectif est atteint, peu importe les outils ou exercices faits, l’élève colorie en vert la case correspondant au brevet validé qui est un tableau à double entrée avec les prénoms des élèves et les différents brevets affiché en fond de classe.
        L’avantage ici est qu’un seul objectif à la fois est travaillé. L’inconvénient c’est qu’à première vue, ce système ne permet pas de revenir sur un objectif un peu plus tard, mais ses élèves remplissant leurs plans avec elle, elle peut leur imposer de travailler certains objectifs en fonction des besoins de chacun.

        Avec ce type de fonctionnement dit « personnalisé », il faut bien se dire que c’est avant tout personnalisé à l’enseignant. 😉

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